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Intégrale des Causses, ne jamais lâcher...

Dernière mise à jour : 18 oct. 2019


On se dit souvent que le trail est une métaphore de la vie. J'ai pu en faire une nouvelle fois l'expérience à l'occasion du 62km du mythique festival des Templiers, l'Intégrale des Causses. Une expérience certes un peu cuisante mais néanmoins très enrichissante.

La préparation

Revenons quelques semaines en arrière, dans la foulée d'une première participation à Sierre-Zinal plutôt aboutie (3h06), là où la solide préparation spécifique aux Templiers concoctée par le coach Vincent a débuté. Cela a été un long cheminement fait de hauts et de bas pour aller chercher au plus profond des capacités d'adaptation du corps, la loi de l'hormèse sublimée !

Je garderai notamment en souvenir une belle semaine de 25h d'effort mêlant toutes les composantes de l'entrainement trail : séances de vitesse, de seuil, de côtes, travail de musculation en force et pliométrie, sortie vélo au Lautaret et Galibier ainsi qu'une longue et magnifique journée d'alpinisme - la traversée du Dôme de Monetier - partagée avec mon père comme compagnon de cordée.





Crédit photo : Philippe Bonnet


Crédit photo : Philippe Bonnet


Crédit photo : Philippe Bonnet


Crédit photo : Philippe Bonnet


Crédit photo : Philippe Bonnet

Il y a aussi eu le trail "courir pour des pommes" au cœur de la préparation, 35km de souffrance ce jour-là heureusement partagés avec mon pote Jérémy, où je lâche sur la fin une deuxième place commune qui nous tendait la main pour terminer à une anecdotique 4ème place...

Enfin, une victoire sur le petit parcours du trail des Glières qui me tenait à cœur, permettant d'engranger un peu de confiance 15 jours avant l'échéance, une super journée partagée là-aussi avec les copains qui portaient la joëlette de Siméon pour l'association "des Cimes et des Monts"... Magnifique !

Bien sûr, tout cela a laissé de traces et malgré une hygiène de vie optimisée au mieux sur les dernières semaines, le corps m'envoie quelques signaux de fatigue.

Néanmoins, c'est avec beaucoup d'envie d'aller "faire quelque chose" là-bas que je prends la route de Millau la veille de la course et pose mes valises en fin de journée dans une sympathique maison écologique de Saint-André-de-Vézines.

La course

Une fois le départ donné dans le charmant village médiéval de Peyreleau, je suis à la lettre mon plan de course : rester relativement prudent jusqu'à la Roque-Sainte-Marguerite (km30) puis si les jambes le permettent, rentrer dans une course plus offensive au niveau de la montée sur Pierrefiche.

Après la première ascension au-dessus de Peyreleau, je me retrouve rapidement en 5-6ème position en compagnie de Thomas, sympathique traileur grenoblois. Nous ferons course commune jusqu'à la Roque. Nous ne traînons pas en route sur les pistes forestières du plateau du Causse noir tout en relances, mais sans jamais se mettre dans le rouge pour ma part. Au premier point de ravitaillement de Saint-André-de-Vézines, on nous annonce tout de même 4 minutes de retard sur la tête de course, ce qui est à la fois déjà beaucoup après 20km de course mais peu au vu de ce qui nous attend par la suite. Je ne m'affole donc pas en me disant que la route est encore longue et veille à bien m'alimenter : dattes et figues sèches, eau/jus de pomme/sel de mer, bananes à chaque ravitaillement... comme à mon habitude, simple et naturel.


Le visage marqué en haut de la dernière montée

À la Roque, je passe 4ème et les sensations sont encore excellentes en montée donc je hausse significativement le rythme. À peine en haut de la côte je reprends le 3ème qui semble marquer le pas, ça commence à sentir bon pour le podium même si tout peut encore arriver sur la deuxième moitié de course. En basculant sur Pierrefiche, je reviens sur le 2ème et ai en visu le 1er juste devant ! Je rentre et sors du ravito avec Stéphane Vinot, échange quelques mots sympas avec lui puis le décroche sur cette partie roulante propice à mes qualités de vitesse tant travaillées lors de la préparation.

Enfin, je dépasse assez rapidement Nicolas Buys qui était alors premier. Ça y est me voilà en tête de la course, je l'avais souvent visualisé durant toute la saison mais le fait de le vivre me fait pousser des ailes. Me sentant encore bien, je décide de maintenir un rythme assez élevé voire de pousser encore un peu plus afin d'essayer de creuser l'écart et pouvoir gérer un éventuel coup de moins bien en fin de course. Celui-ci commencera à se faire sentir un peu plus loin, aux alentours du kilomètre 45 où les jambes deviennent alors vraiment dures dans les faux-plats montants.

Néanmoins, je veille à relancer sans cesse en me disant que je suis en train de réaliser quelque chose de chouette à mon niveau et que je ne peux pas lâcher maintenant.

À Massebiau, on m'annonce une avance estimée à plus de 10 minutes ! J'ai du mal à y croire mais pense quand même avoir pris au moins 5 minutes, ce qui est effectivement le cas (6min en fait). J'attaque donc la redoutable montée au Cade gonflé à bloc, mais le soleil qui commence à chauffer ainsi que les jambes lourdes me font coincer un peu. En haut sur le plateau c'est pire, même si j'apprendrai par la suite que j'avais encore 5 minutes d'avance à ce moment-là, j'ai de plus en plus de mal à relancer. Je me traîne jusqu'au sommet de la course, la Pouncho d'Agast, puis l'insolite passage dans la grotte du Hibou et amorce la descente finale sur Millau.

Ça commence à sentir très bon, je gère en essayant surtout de ne pas me blesser et en dépassant le plus habilement possible les concurrents des autres courses du jour.

Depuis un moment déjà je commence à savourer la victoire qui se dessine, ça y est j'entends le speaker et les frissons commencent à monter... Puis soudain, à environ 500m de la ligne, des bruits de pas très forts arrivant dans mon dos m'incitent à me retourner et à ma plus grande stupéfaction je vois Stéphane qui déboule comme un dératé alors que je le pensais loin derrière ! Sur le coup je suis abasourdi, j'essaye de relancer la machine pour l'empêcher de me doubler mais dans son élan, sa rage de vaincre et l'ascendant psychologique qu'il a pris je n'y parviens pas. Je glisse dans le dernier virage et perds alors tout espoir de victoire, je finis les 30 derniers mètres en roue libre complètement effondré et en colère contre moi-même. J'essaye de faire bonne figure, mais sur le coup c'est très dur.

Malgré tout, assez rapidement, la déception s'atténue et je me dis que j'ai réalisé la course que je rêvais de faire, jusqu'au dénouement final... Peu importe la place à l'arrivée, même si j'aurais préféré gagner j'ai couru comme il me semblait le mieux pour ne pas avoir de regrets. J'ai vibré, pris énormément de plaisir, profité des paysages magnifiques et suis allé au bout de moi-même.

Cette expérience me servira pour la suite, c'est à n'en pas douter. Comme le dit si bien le proverbe :

"Ce n'est pas le but qui compte, mais le chemin qui y conduit"...



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